dégagement du rocher

Un morceau de rocher s'était détaché de la colline pour glisser contre l'ancienne école. Il vient d'être débité et dégagé:



le Pélérinage de Saint Victor

Chaque année a lieu le Pélérinage de Saint Victor, le troisième dimanche de septembre. C'est un Pélérinage tel qu'on les pratique dans les paroisses rurales du Cantal. Il n'y a pas une longue marche, mais un rassemblement au bas de la colline, une montée avec quelques arrêts, puis la messe dans l'église.






La vierge priée est Notre Dame des Sept Douleurs, auquel le rétable de la chapelle latérale est consacré.


"Victor, tu as vaincu!": qui était Saint Victor?


Vitrail de l'église de Saint Victor (Cantal)

Victor était un officier romain de la Légion Thébaine. Il faisait partie des 6500 soldats chrétiens, intégrés dans l’armée romaine de l’empereur Maximien. Ayant refusé de sacrifier aux dieux païens, la Légion Thébaine, conduite par Saint Maurice, fut massacrée en 286 à Agaune (Suisse). Victor, un des officiers de la Légion, parvint à s’échapper.
 
Plus tard, affecté à Marseille, Victor fut arrêté par le Préfet Euticius, qui le somma de renoncer à sa foi et d’adorer Jupiter. Victor refusa d’adorer les idoles, jusqu’à la ce que Euticius le fisse broyer sous une meule de moulin. Une voix céleste s’éleva alors: « Victor, tu as vaincu ! ».

Telle est l’histoire de Saint Victor de Marseille, prié dans le Cantal à Massiac, Polminhac et bien entendu Saint Victor : un soldat martyr de l’époque romaine.
Saint Victor est représenté dans l’église par une statue de bois doré, un vitrail du XIXème siècle, et les reliques de la pierre du Maitre-Autel.

Saint Victor, Image d'Epinal

réinstallation de l'autel

Après une vingtaine d'années d'exil au Presbytère, le Maitre-Autel Louis XV de l'église est réinstallé à sa place d'origine.







l'église de Saint Victor



Cette église est typique des églises des montagnes d’Auvergne, avec sa silhouette trapue, ramassée sur des fondations de roc, calée contre un clocher à peigne. Une petite porte ouvre sur le côté d’une nef couverte simplement d’un plafond de planches. Elle peut contenir une centaine de personnes.
Le chœur roman est la partie la plus ancienne, très bien proportionné, avec une voûte en cul de four. Le maître autel Louis XV en avait été malencontreusement arraché dans un réaménagement liturgique radical de la fin du XX°siècle. Il vient d’y être rétabli.
Une petite chapelle latérale est dédiée à N.D des Sept Douleurs, avec un retable rural du XVIII° siècle aux peintures naïves. A l’entrée de l’église, un beau bénitier roman est monté sur un pilier.



L’ensemble est d’une grande simplicité, très bien entretenu. Il y avait jusqu’au début du XX° siècle curé et vicaire à Saint Victor, qui logeaient dans le Presbytère voisin. Puis la paroisse a été desservie par le curé d’Ayrens, jusque dans les années 1990. Le manque de prêtres et la réorganisation des paroisses font qu’aujourd’hui, cette église est desservie une fois par an seulement par des prêtres d’Aurillac.




en 1782, "l'approche en est pénible de toutes parts"





"Cette paroisse est située entre plusieurs coteaux fort escarpés et élevés, au pied desquels passe le ruisseau d'Etze qui fournit peu d'arrosement aux prés qui l'avoisinent, à cause de l'enfoncement de son lit.

Le bourg ne renferme que quatre maisons y compris le Presbytère. il occupe le cantonnement le plus isolé et le plus désert, de sorte que l'approche en est pénible de toutes parts à cause de la pente rapide et des rochers considérables de ces coteaux. Le surplus de la paroisse est formé de 9 villages et 4 hameaux, ce qui, en général, renferme environ 60 maisons. il y a en outre 3 moulins à grains qui sont de peu de considération.

Les terres ne produisent que de médiocres récoltes en seigle et en blé sarrazin à cause du terrain sec; graveleux et garni en général de bruyères et rocailles. Les prés, n'étant arrosés que par les eaux pluviales, ne donnent que peu de fourrage.

Il n'y a pas de bois de haute futaie, mais seulement quelques petits bois taillifs et des arbres épars à l'entour des possessions qui fournissent à peine pour la consommation des habitants.

Il ne s'y tient auvune foire ni marché. Il n'y a même aucune grand'route qui facilite le commerce. Les habitants qui ne recueillent pas de quoi fournir à la subsistance de leurs familles vont se pourvoir au marché d'Aurillac et plusieurs sont contraints de s'expatrier pour se procurer dans les provinces voisines des facultés pour acquitter les fortes charges auxquelles leurs biens sont asservis.

Les différents seigneurs qui exercent la justice et qui perçoivent des rentes dont le Sr de Jugeal de La Bontat, à Sainte Illide; le Sr de Liguerac, à Saint Chamant, le Sr Capelle, Conseiller au Présidial d'Aurillac. Le Chapitre Saint Géraud d'Aurillac et la communauté des prêtres de Laroquebrou perçoivent aussi quelques rentes.

Le prieur-curé de la paroisse perçoit la dîme à la 11ème gerbe et à la 25ème suivant les cantons, ce qui fait un objet de 300 l. Le casuel est de 30 l.

Observations de Jacques Daslosse, contrôleur du vingtième en 1782

en 1824, "presque tous les hommes émigrent"




"La commune de Saint Victor, bornée au nord par celle de Saint Santin, à l'ouest et au sud par celle d'Ayrens, et à l'est par Nieudan, fait partie du canton de Laroquebrou et de l'arrondissement d'Aurillac.

Elle st arrosée par les ruisseaux du Meyrou et de Prallat; les rivières de Saint Victor, d'Etze ou d'Aize et de Soulane la limitent à l'ouet et au nord.

Sa population est de 496 habitants, répartis dans un bourg, 14 villages ou hameaux et 51 maisons.

Son territoire est couvert de bois, de rochers, et coupé de ravins profonds; il est froid, maigre et peu fertile; il y a cependant quelques bonnes prairies; les bruyères servent à faire pacager les moutons.


La culture de ce pays est confiée aux femmes; presque tous les hommes émigrent pour exercer l'industrie de chaudronnier ou celle de cordonnier.

L'église, autrefois annexe d'Ayrens, et plaçée sous le vocable de Saint Victor, s'élève sur les ruines de l'ancien château que la famille de Veillan avait donné à la commune.


 
Le petit bourg chef-lieu, à 9 kilomètres au nord ouest de Laroquebrou et à 14 sud ouest d'Aurillac, occupe une position pittoresque, sur un rocher formant presqu'île, dont une petite rivière fait le tour.


Extrait: Dictionnaire Satistique du Département du Cantal, 1824

vers 1900




de gauche à droite: maison d'habitation, Eglise, puis la "barre" comprenant successivement trois batiments accolés: le Presbytère, la Mairie, l'Ecole. A droite de l'école, le préau des élèves, aujourd'hui détruit.

un château disparu



"La seigneurie de Saint Victor était en 1251 à Durand de Montal, seigneur de La Roquebrou. Il en fit hommage cette année au comte de Rodez. Elle fut donnée en fief par lui à la famille de Selves, et, en 1281, Pierre chevalier, et Bernard de Selves, seigneurs de Saint Victor, furent, l'un arbitre et l'autre témoin de la charte accordée aux habitants de La Roquebrou par le seigneur de Montal.

La famille de Prallat, et, plus tard, celle de Jugeals de Peyrac de Veillan, succédèrent à celle de Selves dans la possession de Saint Victor.
La famille de Prallat tire son origine du château de Prallat, aujourd'hui détruit, et qui était situé sur le ruisseau du même nom, dans la commune de Saint Victor. Jacques de Prallat était coseigneur de Poul, commune d'Arnac, en 1329, et Jean de Prallat en 1408. On a vu comment le chateau de poul fut saisi sur le seigneur de Prallat par le baron de Montal en 1470.

La famille de Prallat paraît avoir fait alliance avec celle de Veillan et avoir possédé par la suite le château de Veillan, comune de Saint Illide, dans le courant du XVII° siècle. En 1602, Louise de Prallat épouse Mercule de Jugeals de Peyrac, et lui porta les terres de la Bontat, Veillan, Bassignac, etc. On trouve néanmoins après cette époque Antoine de Prallat, seigneur de Saint Victor et de Gorces, qui fut maintenu dans la noblesse en 1666, et servit avec distinction sous Louis XIV; il fut fait Gentilhomme de la Chambre le 5 avril 1647. La famille de Prallat s'éteignit, et la terre de Saint Victor passa définitivement à la famille de Jugeals de Peyrac de Veillan.
Cette famille paraît être originaire de la Vicomté de Turenne, dans le Bas-Limousin. On découvre des traces de son existence dès l’an 1180. Elle a rpouvé sa filiation devant M. de Fortia, Intendant d’Auvergne, à dater de N. de Jugeals de Peyrac, damoiseau, qui vivait en 1365.
En 1402, Etienne de Jugeals de Peyrac commandait le ban et l’arrière ban du Limousin; il était marié avec Antoinette de Pleaux."

Extrait: Dictionnaire Statistique du Département du Cantal, 1824

un village fantôme



Dire qu'un lieu du Cantal est au bout du monde participe aux légendes locales: ils sont si nombreux, ces bouts du monde, que la Haute Auvergne est un boulevard des endroits inaccessibles.

A Saint Victor, on est dans le vrai. Il faut traverser des bois coupés, des vallées étroites et inhabitées, traverser plusieurs fois des ruisseaux, pour arriver au pied de la colline, sans bien savoir où l'on est ni où l'on va. La montée se fait à pied jusqu'à un village fantôme, avec quatre maisons au pied d'une petite église d'origine romane.


Pompeusement baptisé le "site" de Saint Victor, le lieu dégage une impression étrange, avec un paysage qui d'année en année se ferme avec la poussée des bois. Vu de l'est, le village est suspendu au dessus du rocher, conforté par d'anciennes terrasses délabrées, rompues par la poussée des chênes.

Saint Victor est un des lieux les plus émouvants et mystérieux du Cantal. On est au coeur d'un village, avec plus de morts au petit cimetière qui entoure l'église, que d'habitants dans les maisons qui ceinturent le rocher.